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Affichage des articles du décembre, 2020

Pente douce

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De tous les souvenirs liés au skateboard, l'un des plus vivaces - et donc l'un des plus beaux, car je mesure toujours la beauté d'un souvenir à l'aune de son éclat, et non de son contenu émotionnel - concerne une nuit de 1997. Mon père avait un 4X4. Passionné de désert et de rallyes, il partait parfois rouler sur les pistes d'Afrique du Nord. Mes parents avaient divorcé et lui résidait à A..., où il avait refait sa vie. Sa nouvelle femme avait deux enfants, dont l'aîné, Vlad, avait à peu près mon âge. Nous faisions tout un tas de conneries ensemble. Un jour, nous avions même tiré à la carabine en pleine zone résidentielle. Nous fumions des joints et nous faisions un peu de skate et de roller. Nous passions la plupart de nos week-ends le cul sur le trottoir de la rue, défoncés, à échafauder de mauvais plans.  Mon père comprenait, quand trois adolescents se pointaient à table avec des lunettes de soleil, que nous avions pris du shit, mais il ne disait rien. Il ava

Trêve des confiseurs

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J'ai eu la visite d'un ami hier. Ce qui aurait dû être un moment agréable m'a rendu effroyablement triste. J'essayais de parler de ce qui me préoccupe mais j'avais la sensation de n'être pas écouté. J'ai fini par aller au lit en me disant que ça irait mieux aujourd'hui.  En tout état de cause, ça ne va pas mieux. La librairie est pleine de connards parisiens qui viennent répandre leurs miasmes dans notre région de bouseux. On les reconnaît à leurs bottines de tapettes et à leur bouche coincée en cul de poule à force d'abuser des selfies. Je méprise ces gens. Ils sont suffisants alors même qu'ils sont incapables de tenir une conversation intellectuelle. Leur horizon se limite à Anna Gavalda et au RER, mais comme ils ont du fric et qu'ils sont sapés en putes Instagram, ils pensent mériter mon respect.  Je ne pense pas être meilleur qu'eux, je suis moi aussi un sac à merde, mais je tiens à mon droit de haïr ces raclures de bidet. Ce sont des

Ténèbres

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  Cet espace se transforme en journal intime. Quelque part, le skateboard n'était qu'un prétexte même si j'entends parler à nouveau planche ici. En vérité, je nourris l'espoir que le skate m'arrache à mon apathie et à ma colère rentrée. Aujourd'hui, je travaillais mais j'avais aussi thérapie. Ce genre de plan est nul à chier, notamment en période de fêtes - encore plus au temps du Covid. Vous arrivez à la librairie, vous essayez de vous mettre dans une routine neutre de travail, et puis c'est l'heure de la consultation. Après, vous devez vous mettre à nouveau dans une routine neutre de travail, mais ça tient difficilement quand vous avez passé une heure à parler du gouffre en vous et des violences que la vie vous a infligées. Mais après tout, qui s'en soucie ? Comme le dirait Hideo Azuma, ce n'est pas le moment de rigoler. Ma dernière prise de sang a l'air tellement désastreuse que, pour la première fois, j'ai peur d'aller voir mo

Bardo Thödol

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    Faire un blog est démodé. Parler de la mort est démodé. Être soi est démodé. La vie contemporaine pourvoit à tout ce qui est à la mode, à tout ce qui est nécessaire pour rendre bouffis nos visages, nos visages suffisants et pleins d'aplomb. La vérité, si jamais elle existe, reste cachée derrière les lignes. Je peux parler ici comme je le ferais si j'avais cinq ans, en mettant mes doigts dans le nez et en montrant mon cul aux passants. Je peux énoncer une vérité - elle ne concernera que moi, mes poumons remplis de brume alors que je pénètre dans un bosquet à l'automne, le crissement jaloux du gravier quand je ramène la poubelle le lundi après-midi. Toute la merde du monde restera toujours collée à mes basques et je n'en ai rien à foutre. Je n'ai rien à foutre d'être toujours en thérapie à 38 ans, de n'être un modèle pour personne et d'avoir quasiment tout raté.  Je n'ai rien à foutre d'être l'image sale de tout ce que la génération précéde